Après trois années de réflexion, le Synode sur la synodalité lancé par le pape François a abouti dans la soirée du 26 octobre 2024 avec le vote d’un document final. Diaconat féminin, décentralisation, montée en puissance des laïcs et culture de la transparence… Décryptage des principaux points.
C’est l’aboutissement de trois années de processus. Lancé par le pape François il y a trois ans, le Synode sur la synodalité lancé par le pape François a abouti dans la soirée du 26 octobre 2024 avec le vote par les 356 membres de l’assemblée réunie dans la salle Paul VI du Vatican. Fait rare : le pape François a immédiatement déclaré qu’il l’approuvait « expressément » et qu’il ne produirait pas d’exhortation apostolique post-synodale. Le texte entre donc immédiatement dans le magistère du pape. Ce dernier a toutefois pris la peine de préciser qu’il était non normatif.
De nombreuses incitations et propositions parsèment ce document composé de 155 paragraphes. La question de la place et du rôle des femmes dans l’Église, très débattue durant tout le mois de travail écoulé, est bien présente. La question spécifique du diaconat féminin, évacuée de cette dernière session par le pape, refait surface dans un paragraphe, preuve de la détermination de certains membres à ne pas voir cette réflexion s’enliser.
Au-delà des propositions singulières – comme la tenue d’un Synode pour le Moyen-Orient, le fait que des laïcs pourraient célébrer des mariages ou bien la réflexion sur un ministère de l’écoute -, ce Synode pose les bases d’une plus grande décentralisation dans l’Église catholique. Il confirme la volonté de voir les laïcs monter en responsabilité dans la gouvernance des paroisses et des diocèses. En outre, le document plaide à de nombreuses reprises pour la mise en place d’une culture de la transparence dans l’Église afin de lutter contre le cléricalisme et tous types d’abus. Voici les grandes orientations de ce document final.
Participation des laïcs, hommes et femmes
Cette question avait pourtant été extraite des débats de l’assemblée, puisque le pape avait confié les thèmes les plus délicats du Synode à 10 groupes de travail qui rendront leurs conclusions en juin 2025. Mais une partie de l’assemblée a fait savoir son mécontentement, interpellant notamment le responsable du groupe de travail en question, à savoir le cardinal Victor Manuel Fernández, préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi. En mai dernier, le pape François avait dans un entretien clairement écarté la possibilité d’ordonner des femmes diacres. Le fait de voir le sujet revenir dans un document final approuvé par le pontife montre que le Synode a fait bouger des lignes.
« Il n’y a aucune raison d’empêcher les femmes d’assumer des rôles de direction dans l’Église », martèle aussi l’assemblée dans le même paragraphe, qui déplore les « obstacles » qu’elles rencontrent pour leur participation à la vie de l’Église. Concernant le diaconat permanent – réservé aux hommes -, le document final demande qu’il soit approfondi et promu dans les régions où il reste encore méconnu.
Conseils paroissiaux avec des laïcs
Le Synode demande de promouvoir davantage de « ministères laïcs », ces services qui ne demandent pas l’ordination (66), comme les ministères de lecteur et d’acolyte, récemment ouverts aux femmes, et celui de catéchiste, créé par le Pape en 2021. Ces ministères peuvent d’ailleurs être institués – c’est-à-dire confiés de façon durable à un fidèle – ou non. Les pasteurs sont ainsi invités à la « créativité » et au « discernement » pour répondre aux besoins pastoraux, « et pas seulement dans le domaine liturgique ».
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Des laïcs pour célébrer des mariages ?
Toujours dans cette optique des ministères, l’assemblée propose d’examiner « la possibilité d’étendre et de stabiliser » la célébration des baptêmes et des mariages par des laïcs – qui reste pour le moment une exception permise sous certaines conditions (76).
Des liturgies où les laïcs seraient plus impliqués
« Adopter des styles de célébration qui manifestent le visage d’une Église synodale. » C’est dans cette optique que le Synode demande la constitution d’un nouveau groupe d’études sur le lien entre « liturgie et synodalité ». Ce groupe pourrait également s’occuper de la « prédication dans les célébrations liturgiques », peut-on lire. L’article 27 qui contient cette proposition compte parmi ceux qui ont le moins fait l’unanimité.
La question de laisser prêcher des laïcs lors des messes était au programme de ce mois de travail à Rome. Si elle n’a pas fait consensus, les membres du Synode, en faisant cette demande, désirent poursuivre la réflexion. Aujourd’hui, le droit canon réserve la prédication de l’homélie aux membres du clergé (évêques, prêtres ou diacres).
Des femmes dans les séminaires
Le document invite à revoir de fond en comble la formation dans les séminaires, afin de sensibiliser les candidats au sacerdoce dans « un style synodal » (148) « Cela signifie qu’ils doivent prévoir une présence significative de figures féminines », est-il indiqué dans le paragraphe 148, qui a suscité 40 oppositions.
Le document mentionne l’importance de « l’éducation à la collaboration avec tous les membres de l’Église », et invite aussi à mettre en œuvre une forme de mixité (entre hommes et femmes, et entre différents états de vie) dans les études théologiques, y compris celles destinées aux candidats à la prêtrise. Le document souligne l’importance de la formation « dans toutes les dimensions de la personne (intellectuelle, affective, relationnelle, spirituelle) ».
Pour une décentralisation de l’Église
Le périmètre de l’évêque de Rome
Ils invitent à « revisiter aussi à la lumière de la synodalité les modes d’exercice du ministère de l’évêque de Rome ». « En tant que successeur de Pierre, il a un rôle unique à jouer dans la sauvegarde du dépôt de la foi et de la morale, en veillant à ce que les processus synodaux soient fructueux pour l’unité et le témoignage », précisent-ils (131).
La question de la subsidiarité est également abordée : « On pourrait identifier, par une étude théologique et canonique, les matières qui devraient être réservées au pape (reservatio papalis) et celles qui peuvent être renvoyées aux évêques dans leurs Églises ou groupements d’Églises », est-il demandé dans le paragraphe 134.
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Vers un Synode sur les Églises orientales
L’assemblée synodale propose la convocation d’un « Synode spécial » afin de « promouvoir la consolidation et la rénovation des Églises orientales catholiques ». En 2010, le pape Benoît XVI avait déjà convoqué un synode pour le Moyen-Orient, mais la situation de ces Églises a beaucoup évolué après plus d’une décennie de crises majeures dans la région.
Il est aussi proposé l’institution d’un « Conseil des patriarches, archevêques majeurs et métropolites des Églises orientales catholiques présidé par le Pape ». Enfin, le document appelle à la création d’instruments pour aider la collaboration entre Églises latine et orientales concernant les catholiques orientaux exilés dans des pays de tradition latine, dans le but de protéger leur tradition et favoriser les « échanges de dons ».